E3
2015. Alors que la conférence de Sony bat son plein, deux annonces,
coup sur coup, vont faire trembler la salle et faire hurler de plaisir
des milliers d’observateurs. En parallèle de Shenmue III, Square-Enix
dévoile l’un de ses futurs projets : Final Fantasy VII Remake. Malgré
l’attente qui s’annonce, tous rêvent de retrouver Midgar, Cloud, Tifa ou
encore Aeris. Septième épisode d’une série à succès, l’œuvre parue en
1997 conserve une aura unique par la portée qu’elle représente en
occident. C’est véritablement ce titre qui a démocratisé le J-RPG dans
nos contrées et ce n’est pas un hasard si les fans réclamaient, à cor et
à cri, une remastérisation de cet incontournable de l’ère PlayStation.
On se souvient ainsi des réactions totalement hilarantes – et logiques –
des journalistes de GT Live, certains n’en revenant toujours pas à
mesure que défile le trailer. 2015. Cela paraît proche et ça fait
pourtant cinq années que s’est déroulée cette cérémonie historique.
Entre temps, beaucoup de choses se sont passées en interne et on a
appris que le jeu serait en format épisodique. Final Fantasy VII Remake,
tant rêvé, est désormais disponible et on a pris le temps de le
déguster et de la savourer. Bordel… quelle claque !
Avant
toute chose, il est indispensable de prendre ce remake pour ce qu’il
est, c’est-à-dire une relecture moderne de l’épisode original comportant
un nouveau gameplay et des évènements inédits. Final Fantasy VII a
désormais plus de vingt ans et il est le témoin d’une génération 32-bits
qui devait se limiter à des expériences en couloirs et une myriade de
petites zones fermées et reliées les unes aux autres. En ce sens, Final
Fantasy VII Remake reste fidèle à son héritage en proposant des
environnements plus ouverts mais avec une progression assez linéaire. Si
ça ne vous fait peur, vous pouvez poursuivre la lecture de ce texte.
Avalanche émotionnelle
Si
vous avez touché au jeu PlayStation, encore plus à la fin des années
1990, il est tout simplement impossible de ne pas avoir de frissons en
découvrant l’introduction du remake. Alors qu’un aigle survole une terre
aride, le joueur pénètre avec le rapace dans la cité de Midgar où y est
dépeint une vie agréable avec des habitants qui vaquent à leurs
occupations et des enfants qui jouent ou font du vélo. Pourtant, très
vite, l’aspect extrêmement industriel de la mégapole prend le dessus et
révèle des tons ocres, des bâtiments rouillés et une végétation
agonisante. Puis, le réacteur apparaît et la mako s’élève, majestueuse
et menaçante. S’ensuit un travelling physique qui s’éloigne d’Aeris pour
donner un aperçu global de la ville avant que se dessine le logo
emblématique. La caméra effectue un zoom rapide sur un train qui fonce à
toute allure vers la gare la plus proche avant que le joueur ne prenne
la manette. L’avalanche émotionnelle a eu lieu mais le frisson, lui, ne
fait que commencer.
Un gameplay revisité
En
1997, les personnages de Final Fantasy VII n’étaient que des amas de
polygone grossiers et les revoir en 2020 fout une véritable tarte.
Lorsque le groupe écoterroriste s’extirpe du train avec Barret et qu’on
découvre le nouveau Cloud, il y a de quoi rester scotché. Comme il y a
deux décennies, toute la première section au sein du réacteur fait
office de tutorial. On le savait : Square-Enix avait l’intention de
revoir entièrement le gameplay et ils n’ont pas menti. Proches d’un
système à la Xenoblade Chronicles, les combats utilisent le principe de
l’ancestrale jauge d’ATB, l’Active Time Battle qui détermine l’ordre
dans lequel les personnages exécutent leurs actions. Mais désormais, il
est possible de se déplacer en toute liberté autour des ennemis et de
changer, en temps réel, de protagoniste afin de s’adapter aux forces et
faiblesses des adversaires. Barret, avec sa mitrailleuse, peut viser les
cibles en hauteur et peut détruire plus facilement les tourelles de
défense. Durant les rixes, le joueur peut, à tout moment, ouvrir un menu
de commandes afin d’accéder aux compétences, aux sorts, aux objets, aux
techniques dites de transcendance – sorte de furie dévastatrice – ou
encore aux invocations si emblématiques de la série. Cela demande une
petite gymnastique pour maîtriser l’ensemble au départ mais on s’y fait
vite, d’autant que les développeurs ont eu la bonne idée d’intégrer des
raccourcis sur les touches (ce qui évite d’ouvrir constamment le menu de
commandes).
En
dehors des achats liés à l’équipement, le jeu multiplie les clins d’œil
au passé en mettant en avant le concept des Matérias qui confère de
nouvelles aptitudes. C’est notamment grâce à elles qu’on accède à de
nouveaux sorts ou encore aux invocations. On y trouve également une
arborescence – avec un look spatial bien fichu – qui améliore l’arsenal à
disposition. Attaque, défense, résistance, magie, soin… Final Fantasy
VII Remake ne s’encombre pas de menu mais propose néanmoins un système
très profond, qui offre de larges possibilités. À l’époque, on avait
parfois tendance à pester sur la redondance des combats. Aujourd’hui,
ces derniers sont si dynamiques et bien pensés que ça passe crème, même
quand il faut se farcir plusieurs escadrons de soldats. Dans ces
conditions, on est bien content d’avoir une « jauge de Choc » qui
s’enclenche lorsque la cible subit un nombre important de dégâts. Elle
est alors sonnée et ne peut plus réagir pendant un certain laps de
temps. Pratique !
Cloud plus vivant que jamais
Avec
quelques polygones, il n’est pas simple de retranscrire une émotion.
Désormais, Cloud et ses partenaires peuvent transmettre la moindre de
leurs attitudes et le bidonville du secteur 5 n’a jamais été aussi
réaliste. On y découvre le monde « d’en bas » avec toutes les
difficultés que vit la population au quotidien. Midgar, c’est un peu le
Zalem du manga Gunnm, à la différence que Midgar reste plus accessible.
La disparité sociale est mise en avant de manière remarquable et le jeu,
dans son ensemble, est absolument superbe. Il est vrai que certaines
textures peuvent paraître un peu faiblardes mais le niveau de détails,
la qualité de la direction artistiques et le niveau de la modélisation
fait qu’on s’en accommode très vite. Au-delà de la partie
environnementale, c’est assurément les différentes mimiques des
personnages, Cloud en tête, qui font mouche. Dans l’original, on sent
bien qu’il est particulièrement associable et que son passé pèse sur ce
qu’il est devenu mais, là, cette impression est tout simplement
décuplée. Par moments, c’est même une véritable « tête-à-claques » !
Cette distanciation sociale (on est plein dedans au moment où j’écris
ces lignes) s’estompe à mesure qu’il évolue et se lie d’amitié avec
chacun des personnages de l’aventure. Mieux, Final Fantasy VII Remake a
la bonne idée de redonner un peu de poids à des protagonistes qui sont
très effacés dans le jeu de 1997. C’est toute cette osmose qui fait de
Final Fantasy VII Remake un titre qu’il ne faut absolument pas manquer
cette année, et encore moins si vous avez aimé ou adoré l’original. Et
nous n’avons même pas encore parlé des musiques mais elles sont tout
simplement fabuleuses, entièrement réorchestrées et vous ramèneront des
années en arrière. Du côté des voix, le doublage français est
particulièrement réussi – même si certains pourront trouver l’intonation
parfois un peu exagérée de certains protagonistes. Bref, si ce n’est
pas déjà fait, laissez-vous tenter par cette plongée au cœur de Midgar,
il y a de fortes chances que vous n’en ressortiez pas indemnes. Un peu
comme nous autres il y a vingt ans.
VERDICT DU RÉDACTEUR : EXCEPTIONNEL
À
l’inverse de Shenmue III qui, pour certains, s’est révélé une douche
froide, Final Fantasy VII Remake ne déçoit pas. Évidemment, le budget et
la taille de l’équipe n’ont strictement rien à voir entre les deux
titres mais on parle surtout du lien qui les unit depuis l’E3 2015 et
leur annonce retentissante. Square-Enix est parvenu à ne pas froisser
les fans, tout en proposant une relecture de l’original avec les
changements que cela incombe. Graphiquement extraordinaire et doté
d’une direction artistique très réussie, FF VII Remake est, à notre
sens, l’un des meilleurs jeux de la machine et mérite cet engouement. Il
est d’ailleurs d’une telle qualité qu’on en vient à espérer des remakes
aussi solides de licences ayant marqué le média jeu vidéo. Si, un jour,
on nous avait dit qu’on allait incarner un Cloud aussi humain, on ne
l’aurait sans doute jamais cru. Maintenant qu’il est de retour, autant
en profiter… et pour longtemps !
Points forts :
- Visuellement somptueux
- Les musiques et le ton du doublage
- L’excellence du gameplay
- Cloud et ses compères plus vivants que jamais
- La distanciation sociale entre Midgar et le bidonville
- Ce scénario si touchant
- Le mythe revisité et sublimé
- Des personnages plus profonds
Points faibles :
- Certains passages traînent en longueur
- L’aspect linéaire et en couloirs hérité de l’original
- Maintenant, il faut attendre la suite…
Éditeur : Square-Enix – Développeur : Square-Enix – Genre : A-RPG – Date de sortie : 10 avril 2020 – Plateforme : PlayStation 4