Durant la période Dreamcast,
console de la dernière chance, SEGA a décidé de mettre en retrait ses
départements marketing pour privilégier la créativité. Cette philosophie, qui
causera dans un certain sens sa perte par rapport à l’émergence des aventures
solo cinématographiques de la PlayStation, a fait la légende de la machine.
Sans qu’il n’y ait aucune logique commerciale ou presque, la bécane à la
spirale a vu débarquer des jeux incroyables, parfois dans un laps de temps
extrêmement court. Rien qu’à Noël 2000, il fallait choisir entre Shenmue, Quake
3, Skies of Arcadia et autres. Il y avait aussi des bizarreries devenues cultes
comme Rez, Seaman ou encore Samba de Amigo et ses improbables maracas. Alors
que d’autres éditeurs, comme Konami, n'ont pas tenté le pari d’amener des jeux
musicaux vers l’Europe (type Beatmania), SEGA n’a absolument pas reculé. Quitte
à débarquer avec un nombre extrêmement limité de packs comprenant le jeu et les
accessoires. Résultat, à la FNAC, il y avait 500 pièces au lancement et pas une
de plus. Mais avant que le jeu arrive sur Dreamcast, il est sorti en arcade.
Game designer pour la Sonic
Team, Shun Nakamura est entré chez SEGA en 1997. Œuvrant pour de nombreux jeux,
dont Sonic R, Sonic Adventure et ChuChu Rocket!, il est devenu réalisateur de
Samba de Amigo en 2000 : « Cela me rappelle des souvenirs (rires).
Il s’agissait d’un projet expérimental sur lequel j’ai été autorisé à
travailler avec l’équipe de Sonic, ou plutôt, cela a commencé sous la forme d’un
projet avec cette directive : ‘laissez les jeunes faire ce qu’ils veulent’,
et c’était aussi le premier et le dernier projet de jeu d’arcade de l’équipe.
Tout le staff était motivé et nous nous sommes bien entendus. » Alors
que les jeux musicaux sont populaires, lui et ses collègues se mettent à
réfléchir à un concept décalé : « Nous essayions de trouver une
idée qui pourrait être jouée de manière décontractée dans les salles d’arcade
après un karaoké ou une soirée arrosée et notre mot d’ordre était ‘silly fun’, c’est-à-dire
un divertissement idiot. »
Faisait toujours partie de la
Sonic Team, Shun Nakamura a pris les rênes de ce nouveau Samba de Amigo après
avoir terminé Sonic Frontier. Modernisée et remplie de bonnes idées, dont la
notion de poses délirantes à la Twister, cette mouture de 2023 s’avère très fun
et repose sur le motion-gaming. C’est-à-dire que les mouvements s’effectuent à
l’aide des Joy-con de la Nintendo Switch. Proposant plusieurs modes de jeu,
dont des expériences en solo, en ligne, en local, à plusieurs, Samba de Amigo :
Party Central a, en ce qui me concerne, un peu perdu de sa magie. La direction
artistique, façon boite de nuit, ne plaira pas à tout le monde et la playlist, hétéroclite,
semble parfois en décalage avec le concept initial des maracas. Est-ce que c’est
rédhibitoire pour autant ? Non. Il y a même un mode de jeu, façon Battle
Royale, qui a retenu notre attention ! On se retrouve à une vingtaine de
personnes et le but est d’enchainer les performances jusqu’à ce qu’il n’en
reste plus qu’un. C’est drôle, ça bouge bien et on peut choisir de jouer en
motion-gaming ou de manière plus classique « à la manette ». Les
développeurs ont d’ailleurs cherché à dynamiser les pas de danse en instaurant
des « challenges ou « défis » au sein des chorégraphies.
Plus réussi qu’un Samba de Amigo
sur Wii, mais moins marquant que l’original, Party Central est un titre
plaisant pour qui veut s’amuser sur un rhythm game. De manière plus globale, je
regrette que la playlist ne soit pas plus originale et que le contenu, bien que
dense, n’empêche pas au jeu de souffrir d’une certaine répétitivité. Mais c’est
un titre accessible et fun qui tombera à point nommé dans les chaumières lors
de soirées en famille ou entre amis. Nous laissons le dernier mot à Shun
Nakamura : « Jusqu’à présent, le jeu était destiné au marché
national. Nous avons donc choisi des chansons dont les Japonais avaient entendu
et qu’ils pouvaient apprécier. […] Nous avons essayé de sélectionner des titres
qui répondent à un large éventail de goûts. […] Notre studio est également impliqué
dans la série Sonic, donc il ne s’agit pas seulement de courir vite, mais aussi
de rendre le jeu amusant. Nous expérimentons des variations au niveau des étapes,
des scénarios et de la mise en scène. Notre approche n’a pas changé avec ce
titre, et nous avons toujours cherché à créer du rire avec de simples jeux musicaux.
Nous voulons que vous jouiez à ce jeu, que ce soit pour vous amuser avec vos
amis ou pour vous remonter le moral. »